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Alors que les marchés développés ont multiplié les accès de nervosité en 2025, le Mexique a réussi la prouesse inverse : offrir l'une des trajectoires les plus stables et les plus rémunératrices du monde obligataire. Le “Graphique de la semaine” publié par DWS replace cette dynamique dans un contexte plus large : l'économie mexicaine, autrefois symboliquement associée à la volatilité et aux crises de change, s'est transformée en amortisseur inattendu. Dette locale, banque centrale indépendante, discipline monétaire : le Mexique illustre un basculement majeur dans la hiérarchie des risques émergents.
Le rebond du peso depuis le début de l’année 2025 n’est pas un simple effet technique : il résulte d’une séquence cohérente où politique monétaire, crédibilité institutionnelle et structure de financement convergent. DWS rappelle que le Mexique arrivait pourtant d’une période sensible : l’élection américaine de 2024 avait fait craindre une reprise des tensions commerciales, potentiellement destructrices pour un pays dont plus de 80 % des exportations sont destinées aux États-Unis. Malgré cela, le peso s’est renforcé, les obligations locales ont surperformé et la croissance s’est maintenue à un rythme solide.La clé ? La crédibilité de Banxico, la banque centrale mexicaine. Depuis vingt ans, elle a construit une réputation d’orthodoxie que peu de pays émergents peuvent revendiquer. En 2022-2023, lorsque l’inflation mondiale a explosé, Banxico a réagi plus rapidement que la Fed, n’hésitant pas à relever agressivement ses taux. En 2024-2025, elle a fait l’inverse : avant les banques centrales des pays développés, elle a commencé à assouplir sa politique monétaire, mais sans déstabiliser sa monnaie. Cette anticipation maîtrisée explique en grande partie la trajectoire du peso.Le rapport de DWS souligne aussi un facteur souvent sous-estimé : le Mexique a progressivement réduit sa dépendance à la dette en dollars. Historiquement, chaque épisode de tension mondiale se traduisait par une fuite de capitaux, une dépréciation brutale du peso et une détérioration des finances publiques. En 2025, la situation est différente : l’État comme les entreprises se financent davantage en monnaie locale, ce qui réduit mécaniquement la vulnérabilité aux chocs externes.La dynamique est suffisamment robuste pour que DWS qualifie l’économie mexicaine de “résiliente”, un mot rarement employé pour un pays qui fut le symbole de la crise Tequila de 1994. Cette comparaison, explicitement mobilisée dans la note, montre combien le regard des investisseurs a basculé en trente ans.
Dans un contexte mondial marqué par des tensions commerciales, une inflation tenace et des politiques monétaires divergentes, il est rare qu’un pays émergent joue un rôle stabilisateur. Pourtant, c’est bien ce que l’on observe. Les obligations mexicaines en monnaie locale font partie des actifs obligataires les plus performants au monde en 2025, selon les données compilées par DWS et Haver Analytics. Dans un portefeuille diversifié, elles apportent un rendement réel positif, une duration raisonnable et une volatilité contenue — le trio que recherchent tous les investisseurs institutionnels depuis la remontée brutale des taux.Cette résilience prend d’autant plus de sens que les risques extérieurs n’ont pas disparu. DWS évoque notamment la révision de l’accord commercial USMCA prévue pour 2026, une échéance susceptible de provoquer des épisodes de volatilité. Mais tant que le Mexique maintient une politique monétaire lisible et un cadre macroéconomique stable, ces chocs restent absorbables.L’analyse met également en lumière un facteur géopolitique : le nearshoring. Les États-Unis, cherchant à relocaliser une partie de leurs chaînes de valeur hors de Chine, favorisent indirectement le Mexique. Cette tendance structurelle soutient la demande intérieure, stabilise les revenus d’exportation et renforce l’attractivité du pays pour les investisseurs obligataires et actions.Enfin, DWS cite un élément souvent passé sous silence : les doutes persistants autour du dollar. Les menaces politiques pesant sur l’indépendance de la Réserve fédérale ont créé un climat d’incertitude, dont certains émergents profitent. Xueming Song, stratégiste devises chez DWS, le résume clairement : la stabilité du peso est autant le résultat des réformes mexicaines que du manque de lisibilité américaine.
Le cas mexicain dépasse donc largement l’analyse conjoncturelle. Il montre qu’en 2025, les marchés émergents ne se lisent plus uniquement à travers la grille du risque. Certains deviennent des amortisseurs, capables de combiner rendement, discours politique crédible et inflation maîtrisée. Pour les investisseurs français et européens, cela ouvre une perspective nouvelle : les allocations émergentes peuvent redevenir un pilier structurel, et non une simple poche de diversification tactique.Dans une année où les marchés développés ont été secoués par des messages contradictoires des banques centrales, la leçon mexicaine est nette : la stabilité ne vient pas toujours d’où on l’attend.