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Depuis le début de l’année, le titre ArcelorMittal s’est apprécié de près de 20 %, surperformant largement le secteur des matières premières, en retrait de 13 % sur la même période. Cette dynamique contraste avec une valorisation encore modeste au regard de ses ratios, mais reflète aussi la confiance des marchés dans une stratégie industrielle mieux structurée qu’auparavant. Le groupe affiche des marges résilientes malgré des spreads encore tendus sur l’acier. Dans ce contexte, la question est de savoir si ArcelorMittal parviendra à maintenir cette trajectoire, tout en accélérant sa transformation stratégique et son désendettement.
Le premier trimestre 2025 d’ArcelorMittal témoigne d’une performance opérationnelle solide dans un environnement encore marqué par des incertitudes macroéconomiques. Le groupe a enregistré un EBITDA de 1,6 milliard de dollars, en léger retrait par rapport au trimestre précédent (1,654 Md$), mais supérieur aux niveaux planchers observés lors des précédents cycles. Le ratio EBITDA/tonne, indicateur central dans l’industrie sidérurgique, atteint 116 $/t, un niveau jugé élevé au regard des creux historiques.Cette résistance s’explique par plusieurs facteurs : une production minière record au Liberia, une exploitation stable des aciéries européennes et un retour à la normale des opérations en Amérique du Nord. Les expéditions d’acier ont progressé à 13,6 Mt, tandis que la production brute d’acier s’établit à 14,8 Mt. Côté minerai de fer, les volumes extraits par ArcelorMittal atteignent 11,8 Mt, dont 8,4 Mt pour les sites stratégiques que sont le Canada (AMMC) et le Liberia.Le résultat net du trimestre ressort à 805 M$, contre une perte de 390 M$ au T4 2024, traduisant une nette amélioration de la profitabilité, malgré un effet saisonnier défavorable sur le besoin en fonds de roulement, qui a conduit à un free cash-flow négatif de 1,4 Md$.La dette nette augmente mécaniquement à 6,7 Md$, mais reste maîtrisée compte tenu de la liquidité disponible (10,8 Md$). L’agence S&P maintient une notation investment grade (BBB-, perspective positive).
La stratégie de croissance du groupe repose sur des projets à forte rentabilité, dont l’exécution avance selon le calendrier annoncé. Le programme d’expansion de la mine de minerai de fer au Liberia reste l’un des piliers de cette dynamique. Avec une montée en puissance vers une capacité de 20 Mt d’ici fin 2025, il est attendu que ce projet génère un EBITDA additionnel de 450 M$ à plein régime, dont 200 M$ dès cette année.Aux États-Unis, l’aciérie électrique (EAF) de Calvert, en cours de mise en service, marque un jalon important : c’est la première unité de ce type capable de produire des aciers de haute qualité pour le secteur automobile à partir de matériaux fondus sur place. Le premier “heat” est attendu pour le deuxième trimestre 2025. En Inde, la montée en puissance du site de Hazira (objectif de 15 Mt d’ici fin 2026) et le démarrage de plusieurs lignes à haute valeur ajoutée (CGL3, PLTCM, CGAL) sont également des facteurs de soutien structurels au mix produit et aux marges.ArcelorMittal souligne également les effets positifs attendus des récentes acquisitions (Vallourec, Italpannelli), qui pourraient générer un EBITDA additionnel combiné de 200 M$ d’ici à 2025. Au total, les investissements stratégiques réalisés devraient apporter un supplément d’EBITDA de 1,8 Md$ d’ici à 2027, dont 600 M$ dès cette année.Du côté des politiques publiques, le plan européen pour l’acier et les métaux (Steel and Metals Action Plan) renforce les perspectives du groupe sur son principal marché en renforçant les barrières anti-dumping et en soutenant les efforts de décarbonation. Toutefois, ArcelorMittal souligne que ces orientations doivent se traduire rapidement en mesures concrètes (tarifs, accès à une énergie compétitive, etc.) pour déclencher les investissements attendus sur le segment Europe.
Le titre ArcelorMittal se traite actuellement avec un PER anticipé de 6, soit un niveau 33 % inférieur à la moyenne du secteur (9,0). Cela reflète en partie la volatilité cyclique inhérente au secteur sidérurgique, mais également une certaine prudence des investisseurs quant à la soutenabilité des bénéfices futurs.Le dividende attendu affiche un rendement de moins de 2 %, inférieur à la moyenne du secteur (3,8 %), mais largement couvert par les résultats. Ce ratio de distribution de seulement 11 % suggère que la politique de retour aux actionnaires pourrait encore s’intensifier à moyen terme. D’ailleurs, la société a lancé début avril 2025 un nouveau programme de rachat d’actions s’étalant jusqu’en 2030, après avoir déjà réduit de 38 % le nombre d’actions en circulation depuis 2020.La valeur comptable par action s’élève à environ 62 €, contre un cours de Bourse de 26,87 € (au 18 juin 2025), soit un ratio prix/valeur comptable de seulement 0,43. Autrement dit, l’action se négocie à un niveau représentant à peine 43 % de ses actifs nets, bien en dessous de la moyenne sectorielle. Ce décalage traduit une forte décote, qui ne semble pas justifiée par les fondamentaux actuels.Sur le plan de la rentabilité, le ROE (Return on Equity) est tombé à 3 % en 2024, contre une moyenne historique de 10 %, illustrant un recul de la performance malgré des marges brutes encore convenables. Cette dégradation reste à surveiller, bien qu’elle puisse être transitoire, en lien avec la baisse des prix et le cycle d’investissement en cours.Enfin, la volatilité à 12 mois (37 %) et un bêta élevé témoignent d’un risque de marché plus élevé que la moyenne, ce qui justifie une décote mais peut aussi représenter une opportunité pour les profils contrariants.
L’action ArcelorMittal conserve une place à part dans le paysage européen : à la fois décotée, exposée aux cycles, mais aujourd’hui mieux armée que par le passé pour y faire face. L’optimisation du portefeuille d’actifs et le recentrage sur des projets à forte marge ont permis d’élever structurellement le niveau de rentabilité, comme en témoigne un EBITDA/tonne supérieur à 100 $ même en bas de cycle.Dans un portefeuille, le titre peut avoir une place pour des investisseurs en quête d’exposition aux matières premières dans une optique contrariante. Sa valorisation actuelle, ses perspectives d’amélioration de cash-flow via les projets stratégiques, et son potentiel de revalorisation en cas de normalisation des spreads en font un candidat intéressant à moyen terme.Mais la visibilité reste partielle. La normalisation du BFR est attendue pour améliorer le cash-flow au second semestre, et la mise en uvre effective des politiques publiques européennes (CBAM, protectionnisme, décarbonation) sera déterminante. Les investisseurs devront aussi surveiller l’évolution de la demande en Chine, dont les surcapacités continuent à peser sur les prix mondiaux.À ce stade, le redressement est crédible, mais demande confirmation. Une amélioration des marges, conjuguée à une reprise de la rentabilité des fonds propres, offrirait un catalyseur puissant. À défaut, la décote actuelle pourrait persister, malgré une valorisation fondamentalement attractive.
Les informations présentées dans cet article sont fournies à titre purement indicatif et ne constituent en aucun cas une recommandation d’investissement, une incitation à acheter ou vendre un actif financier, ni un conseil en placement. Le lecteur est invité à réaliser ses propres recherches avant toute décision. Les investissements en bourse comportent des risques, notamment de perte en capital. La performance passée d’un actif ou d’un marché ne présage en rien de ses performances futures. Toute décision d’investissement doit être prise en tenant compte de votre situation financière personnelle, de vos objectifs et de votre tolérance au risque.
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