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La suppression des pièces de 1 et 2 centimes semble anodine, mais pourrait provoquer une inflation silencieuse, particulièrement pénalisante pour les foyers modestes. Derrière leur coût de fabrication excessif se cache une vraie question de justice sociale et budgétaire.
Faut-il mettre fin à la frappe des pièces de 1 et 2 centimes d’euro ? Le débat, relancé par plusieurs parlementaires et par la Commission européenne, revient régulièrement depuis dix ans. Car ces minuscules unités monétaires ont un coût disproportionné : 1,65 centime pour en produire une seule de 1 centime, selon la Monnaie de Paris. Au total, leur maintien coûte plus d’un milliard d’euros à l’État et à la société depuis leur introduction en 2002. Mais au-delà du coût de production, leur suppression entraînerait un changement profond des pratiques de paiement, avec des conséquences parfois sous-estimées pour les ménages.Fabriquer ces pièces est devenu anti-économique. La pièce de 2 centimes coûte en moyenne 1,94 centime à produire, soit près du double de sa valeur faciale. En France, la Banque de France et la Monnaie de Paris ont dû gérer un stock cumulé de plusieurs dizaines de milliards de pièces rouges. À l’échelle de la zone euro, elles représentent près de 50 % du volume total de pièces en circulation, selon la BCE. Ces pièces circulent mal : une part importante reste stockée dans les tiroirs, les bocaux, ou les cagnottes d’appoint. Leur utilisation décroît à mesure que les paiements se dématérialisent, mais leur coût logistique – stockage, comptage, transport, sécurisation – demeure significatif. Le coût sociétal annuel de leur maintien est évalué à plusieurs centaines de millions d’euros par an en Europe.
Supprimer ces pièces impliquerait la généralisation de l’arrondi au multiple de 5 centimes pour tous les paiements en espèces. Sur le papier, l’impact est neutre : on arrondit au-dessus ou en dessous. Mais les données des pays ayant franchi le pas (Belgique, Irlande, Finlande) révèlent un biais vers l’arrondi supérieur dans 60 à 70 % des cas. Une simulation française réalisée sur 100 paiements en espèces (alimentation, presse, petits commerces) à 7,80 € en moyenne montre un surcoût moyen de 2,1 centimes par transaction, soit 2,08 € par mois pour un foyer utilisant essentiellement du liquide. À l’année, cela représente près de 25 € de pouvoir d’achat en moins, en particulier pour les 3,5 millions de foyers modestes ou âgés dépendants du cash. À l’échelle nationale, l’impact global dépasserait les 100 millions d’euros d’inflation silencieuse.
Face à ces effets secondaires, plusieurs pistes alternatives sont évoquées. L’Espagne, par exemple, a changé la composition métallique de ses pièces pour en réduire le coût. D’autres pays envisagent un gel progressif de la production, sans suppression brutale. Enfin, certains plaident pour le maintien des pièces pour leurs fonctions sociales : éducation financière (utilisées pour l’apprentissage à l’école), dons spontanés (pièces jetées dans les boîtes à dons ou troncs), ou attachement culturel. En France, selon une étude de la Commission européenne, seuls 51 % des Français sont favorables à leur suppression, contre 72 % des Européens en moyenne. Le sujet divise, mais il mérite mieux qu’un débat symbolique : c’est bien de justice monétaire et de transparence budgétaire qu’il est question.
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