
Des conditions de crédit malsaines pour l'économie ?
Les banques françaises pourraient-elles mettre l'économie en danger en distribuant des crédits immobiliers de façon déraisonnable ? C'est ce que semble penser le Haut conseil de stabilité financière (HCSF). Réuni sous la présidence de Bruno Le Maire le 12 décembre, il estime que « les risques pour la stabilité financière tendent plutôt à s'accentuer à partir d'un niveau déjà élevé ».
Selon l'institution, les banques seraient trop laxistes en matière d'octroi de crédits aux ménages. Ceux-ci sont devenus un produit d'appel dans la concurrence entre les établissements. Mais la baisse des taux a provoqué un allongement de la durée des crédits (près de 3 ans depuis 2015) et une progression du niveau d'endettement des ménages. 28% des crédits seraient aujourd'hui accordés à un taux d'effort supérieur à 33% du revenu net des emprunteurs.
Soulignant une « dynamique de crédit immobilier très rapide (+6,7% à fin octobre) », le HCSF entend donc « limiter la dégradation tendancielle des conditions d'octroi » et prévenir une poussée « excessive de l'endettement des ménages ».
En cette fin d'année 2019, les taux de crédit immobilier sont historiquement bas, proches de 1% et du taux d'inflation.
Des recommandations qui pourraient laisser place à des nouvelles contraintes
Le HCSF s'était déjà saisi du dossier en octobre, concluant à un risque de bulle de crédit et appelant des mesures correctives. Deux mois plus tard, l'institution déclare avoir adopté un « plan d'action visant à conforter le modèle français », celui-ci ayant démontré sa capacité de résistance face aux crises. Selon elle, il est basé sur « le financement au moyen de crédits à taux fixes sur des durées raisonnables » et « une bonne capacité de remboursement des ménages ».
Le Haut conseil demande donc aux banques de se conformer à des bonnes pratiques, à savoir limiter le taux d'emprunt à un 33% des revenus net du ménage et plafonner leur durée à 25 ans. 15% maximum des crédits immobiliers accordés pourront s'écarter de ces règles. 75% de ces écarts devront être réservés aux acheteurs d'une résidence principale, dans la limite d'un endettement inférieur à sept années de revenus.
Pour le moment, la demande du HCSF n'est qu'une « recommandation », bien qu'assez ferme. Si elle n'est pas suivie, l'institution se réserve le droit de fixer les conditions d'accès aux crédits, voire d'exiger des banques qu'elles augmentent leurs fonds propres. L'ACPR sera chargée de suivre les pratiques des établissements tout en vérifiant que « la couverture des coûts et des risques est appropriée ». Le recul des marges bancaires liées à ces crédits représentant l'un des risques de voir les banques fragilisées.
Une des conséquences de ces nouvelles règles tacites pourrait être de restreindre les crédits liés à l'investissement locatif, pour lesquels des taux d'endettement supérieurs à 33% sont souvent acceptés. Les banques ont d'ailleurs récemment commencé à diminuer implicitement cette activité, en renonçant pour certaines au financement d'opérations à 110%.
Des professionnels réagissent

L'annonce a fait réagir le réseau de courtiers Vousfinancer, pour qui le « reste à vivre », déjà encadrée par la loi, semble plus significatif que le taux d'endettement. Cette notion représente le montant restant au ménage après déduction de sa mensualité.
« Une demande de crédit peut être refusée même avec un taux d'endettement à 28 % si la banque considère que le reste à vivre n'est pas suffisant. A l'inverse, un dossier pourra être accepté même si l'emprunteur atteint un taux d'endettement à 40 % si ses revenus le permettent ou vont évoluer dans les mois à venir. Plafonner le taux d'endettement à 33 % d'endettement n'a donc pas beaucoup de sens… d'autant que le taux moyen d'effort en France est déjà inférieur à ce seuil », explique Sandrine Allonier, porte-parole du courtier.
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L'inflation peut se définir comme la hausse continue du niveau général des prix.
Une des conséquences de l'inflation est la perte de pouvoir d'achat de la monnaie. Lorsque les prix augmentent, la même quantité de monnaie ne suffit plus pour acheter les mêmes produits.
Par exemple, avec une inflation de 1,8% par an, un produit qui coûterait 100 € en 2022 pourrait coûter 101,8 € en 2023. Il faudrait donc augmenter la quantité de monnaie nécessaire pour acheter le produit.
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