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Lululemon, Spotify, Roblox ou Uber : les jeunes générations investissent dans des marques qui leur ressemblent. L’investissement devient un prolongement du style de vie, entre quête de sens, digitalisation et culture de la performance.
Longtemps perçue comme peu concernée par la Bourse, la génération Z (nés après 1997) a désormais pris le contrôle de son patrimoine naissant. Moins fortunée que les baby-boomers mais bien plus informée, elle investit en ligne, sur mobile et par affinité. Selon plusieurs plateformes de trading, les 18–35 ans privilégient les actions qui traduisent leurs valeurs et leur quotidien : mobilité, bien-être, divertissement, économie du partage. Le phénomène ne concerne plus seulement les États-Unis. En Europe aussi, les jeunes investisseurs se tournent vers des entreprises dont ils utilisent les produits : Spotify, Apple, Tesla, Netflix, Lululemon, Roblox, WW International (ex-Weight Watchers). Ces marques incarnent un mode de vie : connecté, sain, créatif, flexible. Pour ces nouveaux épargnants, investir, c’est “mettre son argent dans ce qu’on comprend et qu’on consomme”. Autre tendance forte : la montée du fractional investing. Grâce à des plateformes comme eToro, Trade Republic ou Robinhood, les jeunes peuvent acheter une fraction d’action pour quelques euros. Résultat : une démocratisation sans précédent de l’investissement, qui favorise la curiosité financière et le sentiment d’appartenance.
Ces jeunes investisseurs ne cherchent pas à battre le marché. Ils veulent participer à des trajectoires économiques qu’ils jugent porteuses : le bien-être, l’innovation technologique et la responsabilité sociale. Une logique d’engagement plus que de spéculation. Les chiffres confirment ce glissement culturel. Selon une étude de Charles Schwab, près de 70 % des investisseurs de moins de 30 ans choisissent leurs actions en fonction des valeurs éthiques ou environnementales des entreprises. Le succès des fonds à thématique ESG ou technologique le montre : les jeunes privilégient la cohérence à la performance pure. L’action Lululemon, par exemple, a doublé en cinq ans, soutenue par une image de marque alignée avec la recherche d’équilibre physique et mental. Les communautés en ligne jouent aussi un rôle déterminant. Sur Reddit ou TikTok, des milliers d’utilisateurs échangent analyses, convictions et captures d’écran de portefeuilles. Ce “social trading” crée une forme d’intelligence collective — parfois naïve, souvent passionnée — où la transparence prime sur la technicité.
Le mouvement dépasse la finance : il touche à l’identité générationnelle. Pour les jeunes, le capital devient expérientiel : il sert à financer des valeurs, un mode de vie, une vision du monde. Acheter des actions Spotify, c’est soutenir la liberté culturelle ; miser sur Uber, c’est investir dans la mobilité urbaine ; sur Roblox, dans la créativité numérique. Ce changement de paradigme interroge aussi les conseillers en gestion de patrimoine. Comment parler de diversification ou de rendement à des épargnants qui raisonnent en sens et cohérence ? De nombreuses fintechs adaptent leur discours, comme Yomoni ou Goodvest, en proposant des portefeuilles thématiques liés au climat, à la tech ou à la santé. L’épargne des jeunes reste modeste, mais sa symbolique est puissante. Dans un monde incertain, l’action devient un acte culturel. Et l’investissement, un moyen de se projeter dans un futur choisi, plus que subi.