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Selon Manthos Delis, professeur en économie financière à Montpellier Business School, et Panos Xidonas, professeur en ingénierie financière à ESSCA Business School, la crise du Covid 19 aura de grandes conséquences et provoquera de grands changements. Il est peu probable que le monde revienne de sitôt là où il en était en janvier 2020.
D'après Thucydide : « Ce fut l'ascension d'Athènes et la peur que celle-ci instilla à Sparte qui rendirent la guerre inévitable. ». Au cours des 500 dernières années, on compte 16 cas où une puissance émergente a menacé d'éclipser la puissance dominante ; 12 cas ont débouché sur une guerre. Ça ne veut évidemment pas dire que le conflit entre les États-Unis et la Chine mènera à la guerre, même si elle peut être définie de bien des façons. Mais actuellement, il y a une guerre commerciale mondiale, et la mondialisation faisait déjà marche arrière avant le COVID-19. La crise financière de 2008 a sapé la confiance des électeurs occidentaux dans le système capitaliste de libre marché. Cet impact latent s'est poursuivi avec le Brexit, l'arrivée au pouvoir de Donald Trump et la guerre commerciale entre les États-Unis et la Chine. Le virus ne fait qu'accélérer la tendance anti-mondialisation. Après tout, le débat sera recentré sur le financement des mesures de soutien pendant le confinement et sur la question de comment lutter contre les inégalités exacerbées par la pandémie.
La crise sanitaire mondiale a forcé la plupart des gouvernements à imposer un confinement généralisé, qui a affecté les activités économiques ce qui a entraîné une réévaluation à la baisse des marchés financiers à une vitesse inédite. Les législateurs ont réagi par des mesures de soutien monétaires et fiscales massives. Et un immense oxymore ; les prix des actifs semblent être déconnectés de l'économie réelle. L'éventail de scénarios économiques potentiels pour les 12 prochains mois est très large. Verra-t-on une reprise en V ? Ou verra-t-on une deuxième vague du virus nuire davantage aux activités économiques ? De nombreux scénarios peuvent être envisagés. Dans une vision optimiste, le développement rapide d'un traitement médical pour le virus permettrait aux économies de se rouvrir et de revenir à la normale plus rapidement. Le scénario pessimiste prévoit une deuxième vague forte et agressive du virus, qui pourrait conduire à une récession profonde et aurait pour conséquence la fermeture définitive d'entreprises et la disparition d'emplois. Le scénario de base est associé à une amélioration progressive des chiffres de l'économie, mais avec de nombreux risques d'asymétrie négative.
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En Europe, une mauvaise croissance est attendue pour les cinq prochaines années. Cependant, une récession aux États-Unis serait probablement contagieuse. L'Europe a une balance courante très excédentaire qui lui offre de la flexibilité en cas de ralentissement. Le problème de l'Europe est qu'il n'existe pas de consensus entre les gouvernements : quand le déficit budgétaire est-il souhaitable ou devrait-il être autorisé ? Il est indubitable que l'Europe a au départ été lente à mettre en place des politiques pour faire face au choc du coronavirus. Mais à présent, il y a de nombreuses raisons d'être optimiste pour la zone euro au deuxième semestre 2020. Une impressionnante série de mesures fiscales et monétaires est en train d'être mise en place pour que l'économie tienne le choc. La BCE a lancé un assouplissement quantitatif nouveau et flexible, en d'autres termes : le programme d'achat d'urgence face à la pandémie. Son plan ciblé d'opérations de refinancement à long terme promet de soutenir le secteur privé via des emprunts bancaires à bas prix. La BCE a aussi clairement indiqué qu'elle est prête à aller plus loin dans sa politique de relance monétaire, si les projections concernant l'inflation ne montrent toujours pas de progrès suffisants vers la stabilisation des prix. Le fonds de relance permettra aux pays de l'UE de réaliser des économies substantielles en leur épargnant les rendements plus élevés des obligations souveraines, moins bien notées que le triple A européen. C'est un important premier pas vers une intégration fiscale plus forte au sein de l'UE, qui pourrait être considéré comme un événement historique majeur. La question que se posent maintenant les investisseurs est de savoir si un tel soutien peut continuer à compenser une chute libre des profits des entreprises.
Si l'on se penche de près sur le cas européen, on peut souligner que les économies européennes émergent peu à peu du confinement, mais le coût économique a été élevé, si bien que l'OCDE prévoit pour la zone euro une baisse du PIB de 9,1 % en 2020, suivi d'un rebond à 6,5 % en 2021. Le désavantage de l'Europe au début de la crise du COVID-19 était son absence d'arsenal politique. Le taux directeur de la BCE était déjà négatif, il y avait des règles strictes pour augmenter les déficits budgétaires et les pays avec une forte dette risquaient de subir à nouveau la crise de la dette de 2012. Cependant, la réponse politique a été une très bonne surprise. La BCE a musclé son programme d'achat d'actifs, avec une progression supérieure à 12 % du PIB européen. Le plafond des déficits budgétaires a été temporairement assoupli, ce qui a entraîné une relance budgétaire de l'ordre de 3,5 % du PIB dans la région.
L'accord sur le fond de relance atteint par les chefs d'État européens n'est pas idéal, mais c'est tout de même un accord ; il ouvre la voie vers une plus grande intégration européenne. Après d'âpres négociations, le Conseil européen a annoncé un accord sur un plan de relance spécifique. L'accord maintient le fond de 750 milliards d'euros (5,5 % du PIB de l'UE en 2019) proposé en mai, cependant, l'allocation entre les subventions et les emprunts a été modifiée en faveur des emprunts, du fait des réticences des Pays-Bas, de l'Autriche, du Danemark et de la Suède. La version finale comprendra 390 milliards d'euros de subventions (au lieu de 500 milliards) et 360 milliards d'euros d'emprunts (au lieu de 250 milliards). De plus, les pays qui demanderont des fonds devront soumettre un plan stratégique de redressement et de résilience à une approbation à la majorité et non à l'unanimité, comme le suggérait le Premier ministre Rutte.
Après plus de 6 mois de pandémie de Covid-19, le nombre de cas a dépassé les 10 millions dans le monde entier et l'économie mondiale a été durement frappée par les nombreuses fermetures pour contenir la propagation de la maladie. L'épidémie est l'un des événements les plus destructeurs financièrement des 120 dernières années, une période qui comprend deux guerres mondiales, la Grande Dépression et les grandes crises financières. Les acteurs du marché considèrent la crise de la pandémie comme la première crise du développement durable du XXIe siècle et comme celle qui a recentré l'attention sur le changement climatique, devenant un signal d'alarme pour que les gouvernants priorisent une approche plus durable de leurs investissements, qui prenne également en compte le changement climatique. La crise du Covid-19 a conduit à un blocage économique global sans précédent au premier semestre 2020. En Europe, les processus budgétaires et le plan de relance cité précédemment pourraient façonner le futur de l'union vers une croissance plus durable et égalitaire. À quoi s'attendre ? Personne ne peut le dire avec certitude. L'éclatement de la bulle internet s'est ensuivie de 10 ans de baisse du marché pour le secteur technologique. Et 10 ans après la crise financière globale, le secteur bancaire n'avait pas totalement récupéré. On s'attend à de grandes conséquences et de grands changements après cette crise. Mais une chose est certaine, il est peu probable que le monde revienne de sitôt là où il en était en janvier 2020.